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JAM
9 juillet 2005

La boulangère m'a fait du rentre-dedans

J'ai eu l'impression en allant acheter mon pain (j'ai beau être un être quasi-divin, il arrive que j'aie besoin de me nourrir) que la boulangère me faisait du rentre-dedans. Non pas celle dont j'avais parlé une fois (les lectrices fidèles s'en souviendront car elles connaissent mes écrits par coeur) mais une nouvelle, très jolie malgré la surabondance de maquillage et sympathique.

Nous étions seuls dans la boulangerie, un rayon de soleil inespéré illuminait son visage peinturluré et je sentis qu'elle n'était pas indifférente à mon charme ravageur quand, après que j'eus demandé et obtenu la baguette que j'étais venu chercher, la voix légèrement tremblotante, visiblement émue, sans doute émoustillée par l'effet dévastateur que je provoque sur les hormones femelles, elle me demanda :  « Et avec ceci, vous désirez autre chose ? »

Pour le coup, je fus déstabilisé moi aussi. Je n'aurais jamais songé un seul instant qu'elle pût me poser une question aussi intime. Vite, je songeai à une réponse spirituelle, qui ne tarda pas à s'imposer et je lui répondis du tac-au-tac à peine une minute plus tard : « Je vais prendre deux croissants »

Déjà, les remords la gagnaient. En calculant le total sur sa caisse enregistreuse, sans doute gênée d'une telle audace, l'air penaud, la voix contrite, elle me susurra : « Je vous fais dépenser votre argent »

Triomphant, je lui rétorquai cette réplique fameuse : « Pensez-donc ! L'argent, c'est fait pour être claqué »

Eblouie par tant de mordacité, elle embraya sur un discours que je n'écoutais pas, trop occupé que j'étais à me rengorger de mon imparable réplique, mais dont je saisis néanmoins quelques bribes. Elle me racontait en substance que oui, c'est vrai, mais que la vie est chère, que c'est bien dommage, qu'elle-même, elle n'était pas la dernière à dépenser, etc. Un discours bien médiocre, vous en conviendrez, après l'implacable logique de ma dernière phrase mais n'oubliez pas qu'elle est boulangère et que par conséquent, il ne faut pas s'attendre à des prouesses intellectuelles telles que les miennes.

Je décidai de rompre là notre conversation, non sans une dernière pique, destinée à l'achever  « Voulez-vous que je vous donne les cinquante-deux centimes ? » En toute modestie, je lui évitais ainsi de faire un  calcul sans doute un peu trop dur pour son petit cerveau. Que voulez-vous, je suis bon.

Reconnaissante, elle accepta de bon coeur, visiblement charmée par tant de grandeur d'âme. J'hésitai un instant, me demandant si je ne devrais pas enchaîner sur un sujet qui en général fait mouche à tout coup, le temps. Mais non, pensais-je, ce serait sans doute un peu trop d'émotion pour la pauvrette. Aussi décidais-je de repartir. Non sans l'avoir saluée d'une exquise formule de politesse « Au revoir madame, et bonne soirée »

J'avoue tout de même une petite faute. Il me semble que « mademoiselle » aurait été plus appropriée. Va ! Toute chamboulée qu'elle était, elle n'a sans doute pas remarquée.

A suivre...

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