Jalousie

Je dois avouer, non sans avoir conscience que je vais par ce que je vais annoncer vous choquer, que j'ai quelques défauts. Non, n'écarquillez pas les yeux s'il vous plaît, cet aveu est suffisament difficile à faire. Bon, pour les défauts, je n'ai pas non plus l'embarras du choix, ils sont rares, mais pourtant ils sont bel et bien présents. Donc, je suis jaloux. Pas n'importe quelle sorte de jalousie, jaloux en amour. Car j'ai beau y réfléchir, sérieusement, en me creusant la tête, je ne vois pas d'autres exemples dans lesquels j'ai pu un jour être jaloux. Un sentiment d'injustice, dans le travail, oui, mais pas de jalousie. Je ne suis donc "que" jaloux en amour. Et celle-ci me pèse, parce que je ne la comprends pas. Elle n'est pas raisonnable, mais la jalousie est-elle jamais raisonnable ? J'en doute un peu.

Pour voir un peu quelles sont les conséquences que peuvent entraîner la jalousie, j'ai essayé de me mettre à la place de l'être aimé, qui subirait la jalousie de sa partenaire. Cas d'école. Je me suis donc posé la question de savoir ce que je pourrais bien ressentir si ma partenaire était jalouse. Dans un premier temps, ma réponse a été de me dire que j'en serais heureux, que c'était une preuve d'amour. Puis, en réfléchissant un peu plus loin que le bout de mon nez (que j'ai fort beau, vous l'ai-je jamais dit ? Bon, ce n'est pas mon propos) je me suis dit que ce que je pensais était stupide. Car mon raisonnement implique qu'il n'y a qu'une sorte de jalousie, que l'amour est toujours la cause. Or, rien n'est moins sûr. Je sais que de mon côté, l'amour est la cause, mais que sais-je de la motivation d'une autre personne que moi ? Rien. Donc, je n'ai aucune certitude que ma partenaire qui ressentirait de la jalousie m'aime.  En conséquence, aucune raison de se réjouir de quoi que ce soit. Allons un peu plus loin encore, et poursuivons le raisonnement (j'écris au pluriel mais en fait je suis seul à écrire) Demandons-nous ce qu'implique la jalousie pour celui ou celle qui la subit. Je reprends mon cas d'école, celui de l'amoureux subissant la jalousie de sa partenaire. Qu'est ce que ça impliquerait pour moi, sachant que je suis amoureux ? Et bien, je crois, je suis sûr, que je ne ferais plus rien qui puisse alimenter la jalousie de celle-ci. J'éviterais des gens que je pense qu'ils susciteraient des réactions de la part de ma partenaire. Cela implique pour cela que je fasse des choix qui au fond ne me conviendrait sans doute pas. Parce que je ne comprendrais pas pourquoi je dois cesser de faire des choses sous le prétexte que cela pourrait déplaire à ma partenaire, alors que je sais bien au fond que ce que je fais est dénué de toute ambiguité. Bon, je n'ai pas poussé plus loin la réflexion car c'est déjà bien suffisant je trouve à démontrer le vice qu'il y a à être jaloux.

Bon, je reprends mon rôle véritable, celui du jaloux. Car n'oublions tout de même pas que c'est moi qui le suis. Je sais donc, après ma brillante démonstration, la perversité que peut entraîner un tel sentiment. Ma raison a triomphé de la jalousie. Seulement voilà, seule ma raison a triomphé. Ce n'est pas parce que je sais que je ne ressens plus. Et c'est là que le bât blesse. Car je ne sais pas comment agir pour que tout mon être refuse en bloc la jalousie. Mais je veux peut-être aller plus vite que la musique. Après tout, je peux appeler ça une prise de conscience récente (si tel est mon bon vouloir) et je ne peux pas espérer changer radicalement du seul fait d'une prise de conscience. Pour ça aussi, il faut du travail. Donc, il faut que je me prépare à encore subir (j'utilise beaucoup le verbe subir pour parler de la jalousie, mais c'est bien de ça qu'il s'agit) des attaques de jalousie. Je me dis que maintenant que j'ai conscience de certains aspects de la jalousie, mes réactions vont peut-être décroître en intensité, que mon esprit va réguler des sentiments que je ne peux pas aimer.

D'un autre côté, mon raisonnement peut également être totalement faux.